Les habitudes alimentaires des Canadiens sont en pleine mutation. Le prix des aliments demeure une de leurs grandes préoccupations, au même titre que la santé, la diversité culturelle et la durabilité.
Dans le classement de la deuxième édition du rapport intitulé L’agroalimentaire dans le monde : palmarès des pays les plus influents, le Canada passe du onzième au septième rang. On peut en conclure que le pays est sur une lancée, mais qu’il a toujours du chemin à faire. Ces acquis sont une fondation sur laquelle s’appuieront les entreprises du secteur agroalimentaire pour continuer à avancer.
Son avenir réserve autant de difficultés que de possibilités. L’abordabilité, le bien-être, la personnalisation, le numérique et la transparence sont tous des facteurs qui transforment le marché. Cet article présente les variables sur lesquelles on peut exercer un contrôle en anticipant ce qui se profilera à l’horizon, en suivant de près ce qui importe aux consommateurs et en proposant une création de valeur capable de pérenniser une entreprise.
La question de l’abordabilité
Pour bon nombre de Canadiens, le prix des aliments demeure la principale préoccupation à l’épicerie. Même si le Canada se classe très bien en matière de sécurité et d’offre alimentaires, la question de l’abordabilité pose toujours problème pour les ménages. Les producteurs et les détaillants sont pour leur part aux prises avec la hausse des coûts, l’inefficacité des chaînes d’approvisionnement et l’attention grandissante que suscitent leurs marges bénéficiaires.
Les entreprises agroalimentaires doivent trouver un équilibre entre abordabilité et qualité, ce qui ne veut pas dire qu’elles doivent couper les coins ronds. Elles doivent plutôt obtenir des gains d’efficacité en production, explorer de nouvelles stratégies d’approvisionnement et faire des analyses de données pour offrir des produits qui répondent à la demande. Par exemple, une entreprise locale de repas prêt-à-cuisiner pourrait utiliser des aliments saisonniers et locaux pour maintenir la valeur nutritive de ses produits tout en abaissant ses coûts d’approvisionnement. Une marque nationale pourrait quant à elle mener un exercice de rationalisation pour réduire ses frais généraux et ainsi éviter d’augmenter ses prix de détail. Il importe de comprendre que le consommateur économe va privilégier les entreprises offrant des produits sains et durables qui lui permettent de respecter son budget.
Le bien-être à bon prix est une tendance lourde. Les consommateurs veulent des aliments qui les aideront à atteindre leurs objectifs de santé, comme les protéines fonctionnelles ou les produits diététiques spécialisés inspirés des hormones GLP-1 (une catégorie de médicaments conçus à l’origine pour traiter le diabète de type 2). Les entreprises en mesure de proposer des produits à la fois accessibles et bénéfiques réussiront à fidéliser cette clientèle.
La personnalisation comme moteur de croissance
La volonté de faire ses propres choix n’a jamais été aussi forte. L’hyperpersonnalisation n’est plus un concept niché. Les consommateurs veulent des produits et des expériences sur mesure, qu’il s’agisse de repas, de profils de saveur ou de solutions inspirées de leur culture.
L’innovation dans ce domaine se fait à grands pas. Certaines entreprises expérimentent déjà avec l’IA pour offrir une planification de repas sur mesure. D’autres explorent des modèles d’abonnement qui permettent aux clients de modifier les produits dans leur panier. Les repas prêt-à-cuisiner aux saveurs régionales ou internationales suscitent de l’intérêt et donnent aux familles la chance d’explorer une variété de saveurs tout en respectant leurs préférences alimentaires.
Or, la stratégie de la personnalisation n’est pas sans embûches. Sans oublier son aspect technologique, elle nécessite créativité et curiosité pour repenser la conception et la livraison des produits. Les petits producteurs peineront peut-être à faire du sur mesure à grande échelle tandis que les grandes entreprises risquent de perdre en efficacité si elles s’aventurent trop loin du côté de la personnalisation. L’idéal est de proposer un produit qui soit suffisamment personnalisé pour donner l’impression d’être authentique sans pour autant surcharger ses opérations. Une entreprise qui réussit à trouver cet équilibre créera une relation de confiance entre ses clients et sa marque, ce qui entraînera des achats répétés.
L’innovation numérique forge l’avenir
Les effets de la technologie se font sentir dans tout le secteur de l’agroalimentaire. Des emballages connectés au commerce omnicanal, l’intégration des outils numériques devient une nécessité.
Ces derniers ne servent pas uniquement à faire fonctionner une entreprise comme sur des roulettes. L’analyse de données peut aider à prévoir la demande et à éliminer le gaspillage. Les emballages connectés rassurent le consommateur quant à la fraicheur et à la durabilité des produits. Les stratégies de commerce omnicanal permettent aux consommateurs de passer facilement d’une expérience en ligne à une expérience en magasin.
Prenons l’exemple de deux boulangeries de taille moyenne dont il est question dans le rapport L’agroalimentaire dans le monde : palmarès des pays les plus influents. La première a automatisé sa production et s’est taillé une place grâce à des produits de spécialité, ce qui a favorisé la croissance de ses marques privées et son accès à de nouveaux marchés. La seconde avait un seul client, une offre peu diversifiée et une production sans grande automatisation. Elle a essuyé des revers lorsque les conditions commerciales se sont transformées. Ces deux cas montrent que l’investissement favorise la résilience et que l’immobilisme expose une entreprise, même rentable, à des risques.
Pour les PME, l’adoption du numérique peut être un projet ambitieux. C’est pourquoi il vaut mieux commencer par des solutions concrètes et évolutives qui jettent les bases nécessaires pour croître et concurrencer, sachant qu’il est plus risqué d’attendre que de faire les premiers pas.
Inspirer confiance grâce à la transparence
La confiance est l’un des avantages les plus précieux dans le secteur agroalimentaire. Le consommateur d’aujourd’hui s’attend à ce que les entreprises fassent preuve d’ouverture en ce qui concerne leurs ingrédients, leur approvisionnement et la durabilité de leurs pratiques. Ils vont vite pointer les incohérences et récompenser l’honnêteté.
La transparence ne doit pas servir uniquement au respect des exigences réglementaires. Elle sert à décrire un produit d’une façon qui séduit. On peut mettre en valeur les fermes d’où proviennent ses ingrédients, les mesures déployées pour atténuer son impact environnemental ou les valeurs qui le sous-tendent.
Certaines entreprises canadiennes suivent déjà la tendance en mettant de l’avant leurs partenariats de commerce équitable, en utilisant des codes QR pour retracer les produits jusqu’à leur ferme d’origine, ou en rendant accessibles à leurs clients des rapports sur la durabilité de leurs pratiques. De tels efforts permettent de gagner la confiance des consommateurs et entraînent une fidélité difficile à perturber.
Or, l’authenticité s’accompagne de responsabilités. Les consommateurs s’attendent à ce que les affirmations des entreprises soient justes, que leurs informations soient fiables et que leurs pratiques soient conformes à ce qu’elles ont promis. À l’ère des communications instantanées, la crédibilité d’une entreprise peut reposer sur l’issue d’une seule interaction.
Se préparer pour l’avenir
L’avenir s’annonce complexe, mais rempli de possibilités. L’abordabilité, le bien-être, la personnalisation, le numérique et la transparence sont des enjeux qui se chevauchent et qui influencent à la fois les choix des Canadiens et les décisions des entreprises.
Pour préparer l’avenir, les dirigeants du secteur agroalimentaire peuvent commencer par se poser les questions suivantes :
- Comment peut-on répondre aux demandes des consommateurs touchant la santé et le bien-être sans perdre l’abordabilité de vue?
- Compte tenu de notre taille et de nos ressources, à quels aspects de nos activités peut-on appliquer une stratégie de personnalisation?
- Quels outils numériques peut-on employer pour améliorer l’expérience de nos clients et notre rentabilité?
- Comment faire de la transparence un élément central de notre marque au lieu de quelque chose de secondaire?
Les réponses d’une entreprise à ces questions aideront à orienter sa stratégie et à concentrer ses efforts dans un marché qui évolue rapidement.
De conclusions à gestes porteurs
Le nouveau classement mondial du Canada montre que le pays progresse. Cela dit, qu’il s’agisse de la question de l’abordabilité, de la consolidation dans le commerce de détail alimentaire ou des entraves à l’innovation, il y a une foule de problèmes sur lesquels le pays doit se pencher. Pour les régler, il faudra se montrer perspicace, investir et encourager la collaboration entre parties prenantes.
Le portrait dressé par le rapport L’agroalimentaire dans le monde : palmarès des pays les plus influents sert de point de départ pour des actions futures. Pour s’adapter, les entreprises doivent analyser les tendances, faire une planification basée sur des données et adopter des stratégies ESG. Les outils numériques et une fine connaissance du secteur peuvent permettre de repérer les lacunes à combler et de créer des occasions de croissance.
L’avenir de l’économie agroalimentaire canadienne sera bâti par les leaders qui sont disposés au changement. Ceux qui tiennent compte des nouvelles attentes des consommateurs, qui investissent dans l’innovation et qui misent sur la transparence vont transformer la façon dont le Canada va se nourrir.